Texte 1
Dans les sociétés de la tradition, le tailleur à le plus souvent une fonction sociale importante et, à tout le moins, une valeur symbolique particulière. Tel n’est pas le cas, en revanche, de son successeur : le couturier. Dans les sociétés contemporaines d’occident, ce dernier est, lui, doublement dévalué. Victime d’une part d’une esthétique qui distingue les beaux arts des arts appliqués, l’art pur de l’art décoratif, les arts majeurs des arts mineurs, il n’est pas pleinement reconnu comme artiste. Et il n’est pas jusqu’aux premiers concernés qui en refusent le titre. Ainsi Coco Chanel[1] (pour ne prendre que son seul mais non unique exemple) déclarait-elle : « La mode n’est pas un art, c’est un métier. Que l’art se serve de la mode, c’est assez pour la gloire de la mode » ; [.] une robe n’est ni une tragédie, ni un tableau ; c’est une charmante et éphémère création, non pas une œuvre d’art éternelle. La mode doit mourir et mourir vite, afin que le commerce puisse vivre ».
Fréderic Monneyron (1954 -) La frivolité[2] essentielle (2008)
Texte 2
La haute couture n’a de cesse de valoriser les savoir-faire des métiers traditionnels qui entrent dans la fabrication d’un vêtement d’un façonnier[3] au brodeur. Ceux-ci sont bien souvent présentés comme des métiers d’art en voie de disparition dont la haute couture serait pour ainsi dire le conservatoire, et le vêtement issu de ces ateliers est jugé à légal d’une œuvre d’art. À tel point que sa finalité pratique, celle d’habiller, qui n’a pourtant pas disparu, tend à s’effacer au profit de son esthétique seul : vulgaire[4] l’utilitaire. Les présentations de haute couture mettent en scène le vêtement ou plutôt le mannequin habillé comme un tableau, le défilé étant une suite de tableau, bref le lieu d’une jouissance esthétique d’avantage que la démonstration d’une habileté couturière. Du reste les vêtements présentés lors des défilés sont volontiers jugés « importants », qualificatif inouï s’agissant de la fonction même de ces objets.
Odile Blanc, vivre habillé (2009)
Texte 3
La mode s’inspire très régulièrement des autres arts, comme par exemple le couturier Français Yves saint Laurent (1936-2008) crée des robes inspirées des peintures de Mondrian[1]. Pourtant, elle crée aussi un réquisitoire qui lui est spécifique. Ainsi, les exemples des punks[2] ou des gothiques[3] montrent que la mode constitue un mode d’expression autonome, comme le langage ou la musique, avec des propres codes.
Fréderic Godard (sociologie de la mode), 2010
Texte 3
En même temps qu’il fait la mode, le créateur s’invente sa vie. Aujourd’hui, il se passionne pour les magazines « alternatifs », point graphique entre l’art et la mode, où il est question de style, design, cinéma, sexualité, culture, de tout, de rien, mais dont on ne peut ignorer l’existence, pas plus que le déferlement de cette mode « ado », à l’affut de toutes les nouveautés « trop classe », « trop bien », « trop cool ». Le créateur est un personnage fragile qui a la vie dure.
Sonia Rykel, (la mode : la passion de la création » (2001)
[1] Piet Mondrian (1872-1944) L’in des pionniers de l’abstraction (l’artiste se détache de la réalité visuelle)
[2] Mouvement contestataire qui débuta dans les années 1960 aux Etats unis et vers 1970 en France
[3] Mouvement contemporain à celui des Punk.
[1] Créatrice de mode et couturière (1883-1971)
[2] Chose futile
[3] Qui réalise un ouvrage
[4] Perd tout son intérêt. L’utilité du vêtement perd tout son intérêt au profit de son esthétisme