Il n'est pas contestable que le système d'économie¹ dont les impératifs ont, sinon déterminé, du moins favorisé la naissance et le développement des procédés industriels de production des biens consommables est responsable de l’actuelle finalité et de l’actuelle ampleur des techniques d’exploitation des ressources naturelles². Mais ce qui est contestable c’est d’imaginer, comme la mode s’en répand, que la correction du désordre consiste à retrouver un ordre antérieur malheureusement aboli, qu’on croit plus « naturel » ou plus « humain », de la relation de l’homme à la nature. Toute solution de simple retour ou de paisible régression relève non pas de l’utopie, en la matière indispensable, mais du mythe, en la matière fallacieux³. [.]

Où qu’ils soient, les paysans ne cultivent pas la terre mais des champs, objets aussi artificiels que les maisons, les canaux et les routes. [.]Sur les lignes d’un paysage, il faut savoir lire l’effet des techniques de l’homme autant que la spontanéité de la nature.

Georges Canguilhem (1904-1995) ; La question de l'écologie