Le devoir

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Quelques définitions pour commencer à délimiter nos réflexions et à faire une proposition sur une manière qu’aurait la philosophie de s’emparer de ce Concept.

Etymologie: origine latine : de habere (tenir quelque chose de quelqu'un, lui en être redevable).

Définition générale : Ce que l'on doit faire; obligation morale particulière, définie par le système moral que l'on accepte par la loi, les convenances, les circonstances.

Obligation : C’est une limite que se fixe l’humain (règlement intérieur du lycée : on peut ou pas y obéir). L’obligation respecte la liberté sans utiliser la force.

Contrainte : use de la force pour limiter la liberté.

Exemples :

Professionnel : Faire son travail

Religieux : faire sa prière

Sociaux : Être poli.

Définition générale philosophique : Obligation qui incombe à un sujet libre (l’individu, le sujet use de sa volonté pour obéir ou résister).
Chez Kant le devoir est un impératif catégorique, c'est-à-dire on doit obéir sans y être déterminé par un autre motif que le respect de la loi.

Synthèse :

La notion de devoir est entourée d’équivoques qui en compliquent sa compréhension et qu’il faut commencer par réduire. L’obligation qui caractérise le devoir est distinct de la nécessité. « Céder à la force est un acte de nécessité et non de volonté, c’est tout au plus un acte de prudence » Rousseau.


Le devoir concerne la volonté, il ne concerne qu’un être susceptible de choisir. En ce sens je dois le faire implique que je ne puisse pas le faire (logique de choix). Pour continuer à clarifier cette notion, il est important aussi de distinguer devoir, des devoirs. Les devoirs impliquent une obligation liée à une fonction (les devoirs de sa charge par exemple). Ces devoirs sont relatifs à une condition qui est toujours particulière, alors que le devoir est une obligation pour tout humain quelle que soit sa condition.

Le devoir est transcendant à la nature sensible et particulière de l’humain, il est universel « il est au fond des âmes un principe inné de justice et de vertu, sur lequel, malgré nos propres maximes, nous jugeons nos actions et celles d’autrui comme bonnes ou mauvaises, et c’est à ce principe que je donne le nom de conscience » Rousseau.

Pour Kant : « chaque humain trouve en sa raison l’idée du devoir et tremble lorsqu’il entend sa voix d’airain (voix avec un ton particulier, grave) pour peu que s’éveillent en lui des penchants qui lui donnent la tentation de l’enfreindre. ». Or pour Kant il est plus facile de connaître notre devoir plutôt que ce qui nous rendrait heureux. D’un côté de nombreux choix, de l’autre une seule ligne droite.
Le devoir c’est la loi morale, non pas tel loi particulière qui vaudrait dans tel type de situations, mais la conformité en général à l’idée même de loi. La loi morale c’est celle suivant laquelle ma maxime est telle que je puisse vouloir qu’elle soit érigée en loi universelle : « agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle ». L’impératif d’universalité peut s’écrire : » agis comme si la maxime de ton action devait être érigée par ta volonté en loi universelle de la nature ».

La difficulté la plus fréquente de la vie morale se présente sous la forme d’un conflit de devoirs, qui voit s’opposer deux règles. Un tel conflit qui nous élève à la réflexion morale, nous amène à reconnaître, la nécessité de la délibération et la possibilité de l’erreur morale. Prenons un exemple, faut-il soumettre sans conditions à l’interdiction de mentir et dire à un meurtrier qui poursuit un de nos amis qu’il s’est réfugié dans une maison voisine ? Pour certain philosophe, la règle morale doit être subordonnée à la considération des conséquences de son application, pour d’autres comme Kant la véracité (intention de dire la vérité) est un devoir en soi. Tout exception met la règle de véracité en contradiction avec elle-même, c’est-à-dire nie sa valeur de règle.

Jean Paul Sartre propose un autre exemple de conflit moral, celui d’un jeune homme partagé entre le devoir patriotique, qui lui commande d’abandonner la France occupée pour rejoindre les forces Françaises libres et le devoir filial, en vertu duquel il doit rester auprès de sa mère et l’aider à vivre.
D’un exemple à l’autre s’affirme l’impossibilité de séparer totalement la vie morale individuelle du contexte humain, social, historique dans lequel elle s’inscrit. Simone de Beauvoir souligne les antinomies, les contradictions insolubles.

Hegel reproche à Kant le caractère abstrait et tyrannique de l’impératif catégorique auquel il oppose la moralité objective. C’est-à-dire les mœurs et les institutions effectivement pratiquée ou existantes qui constituent « l’éthique concrète ». Cette critique Hégélienne de la « morale Kantienne » reste d’actualité auprès des penseurs contemporains. C’est ainsi que pour Paul Ricœur la raison pratique ne doit pas être une science de la pratique mais une raison critique des opinions érigées en savoirs et en normes.

Il est une critique encore plus radicale de l’idée de devoir, c’est celle qui nie la spécificité du devoir. On peut qualifier de « réduction généalogique » la démarche qui prétend démasquer l’origine voilée, secrète voire honteuse de la valeur et notamment du devoir. Pour Schopenhauer le devoir a comme source l’égoïsme, je m’interdis de faire ce que je n’aimerais pas qu’on me fit. Pour Nietzsche, c’est la relation qui lie un créancier et un débiteur, ce que je dois, le prix à payer, une souffrance morale. Enfin pour Durkheim, la conscience morale prend sa source dans l’autorité morale de la collectivité.

Voir dans le devoir qu’une illusion, refuser d’analyser et de distinguer mauvaise conscience et crainte du châtiment, revient à édulcorer l’analyse de la mauvaise conscience, voir à mystifier. La moralité de nos actes est toujours incertaine, mais la loi morale nous offre peut être cette possibilité d’agir dans le bon sens, vers le bien. Cette direction, cette aspiration semble difficile à justifier par la connaissance, difficile à penser à travers la métaphysique, mais cela peut être une forme d’espérance.