L’homme possède le libre arbitre, ou alors les conseils, les exhortations, les préceptes, les interdictions, les récompenses et les châtiments seraient vains. Pour établir la preuve de la liberté, considérons d’abord que certains êtres agissent sans aucun jugement, comme la pierre qui tombe vers le bas, et tous les êtres qui n’ont pas la connaissance. D’autres êtres agissent d’après un certain jugement, mais qui n’est pas libre. Ainsi les animaux telle la brebis qui, voyant le loup, juge, qu’il faut le fuir ; c’est un jugement naturel, non pas libre, car elle ne juge pas en rassemblant des données, mais par un instinct naturel. Et il en va de même pour le jugement des animaux. Mais l’homme agit d’après un jugement ; car, par sa faculté de connaissance, il juge qu’il faut fuir quelque chose ou le poursuivre. Cependant, ce jugement n’est pas l’effet d’un instinct naturel s’appliquant à une action particulière, mais d’un rapprochement de données opéré par la raison[1]. C’est pourquoi l’homme agit selon un jugement libre.

Thomas d’Aquin (1227-1274), Somme de théologie (1266-1274)

 

[1] Le libre arbitre n’est pas arbitraire puisqu’il vient d’un jugement éclairé par la raison